Remontée puis descente intégrale de la Loire en Stand Up Paddle

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Josué LENFANT est un aventurier sportif dont les aventures ont un but humanitaire et/ou environnemental. Pour sa première aventure « officielle », il a décidé de remonter la Loire à vélo depuis son embouchure à Saint-Nazaire jusqu’à sa source au Mont-Gerbier-De-Jonc. Puis, de la redescendre également dans son intégralité en Stand Up Paddle. Et tout ça en plein hiver et en « quasi » autonomie. C’est à dire en dormant sous la tente et en portant
matériels et vivres.

Personne ne l’a suivi. Il n’a eu que 3 ravitaillements : 1 pour faire la transition entre le vélo et la marche, 1 pour faire la transition entre la marche et le SUP et le dernier après 15 jours de SUP pour refaire le plein de nourriture pour les 15 autres jours prévu.

Il a tenu à réaliser ce projet en hiver pour sensibiliser un maximum de personnes aux conditions inhumaines que subissent les personnes vivant à la rue. Parfois juste sous nos fenêtres… Il a également créé une collecte de fonds sur la plateforme Gofundme dont voici le lien : Collecte de fonds Make It Happen : l’aventure à but humanitaire.

Le total récolté sera reversé à 50% à l’association « Stéphane Bouillon » proche de chez lui qui s’occupe de réinsérer et d’aider des personnes vivant à la rue. L’autre moitié lui servira à couvrir en partie les frais liés à la réalisation de son projet qu’il nous raconte plus en détail ci-dessous. Voir l’album photos complet en bas de l’article (crédits photos : Josué LENFANT)

VÉLO

La première partie en vélo fut la plus « facile ». Elle a duré 10 jours pour faire plus de 1000 kms. J’ai réussi à couvrir plus de 100 kms/jour. Sauf pour la dernière journée!! En effet, j’ai décidé de m’arrêter au Puy-en-Velay pour le 9ème jour et de me laisser les 40 derniers kilomètres qui mènent au Mont Gerbier pour le 10 éme jour.

Ce fut une sage décision. Car très vite, je me retrouve à pédaler dans un épais brouillard et 5 puis 10, puis 15 cms de neige…. Essayez avec un vélo de route (oui oui, un vélo de route!) chargé à plus de 35 kilos c’est très particulier 🙂 . En plus de ça, la veille j’ai dormi par -10 degrés à cause d’une erreur de trajet qui m’a fait passer par des cols sympathiquement pentus et gelés.

Au matin, je pars, je descends un long col, qui me fond littéralement les patins de freins à cause du gel…Je n’ai presque plus de freins!! J’ai mis plus d’une demie-journée pour couvrir 40 kms et arriver au Mont Gerbier!!! Le GPS m’a encore fait passer par le plateau de Fraisse. Plateau qui, je l’apprendrai le Lendemain par des paysans locaux, est le Lieu le plus enneigé du coin où les routes n’étaient pas encore déneigées lors de mon passage….

Voilà voilà, merci Maps! J’ai dû porter mon vélo dans 20 cms de neige par endroit, c’était folklorique. Mieux vaut avoir l’esprit positif!! Mais c’était amusant de croiser
des snowboardeurs et skieurs à la station des Estables qui venait d’ouvrir, pendant que je montai en vélo. Ils avaient l’air surpris et j’ai eu droit à beaucoup d’encouragements.

MARCHE

Je me fais ravitailler du vendredi au dimanche au Mont Gerbier. Le but initial étant de changer de matériel pour entamer la descente de la Loire en hydrospeed. Je prévois de faire 5 jours d’hydrospeed avant de faire une nouvelle transition entre l’hydrospeed et le Stand Up Paddle.

J’avais choisi l’hydrospeed car cela me paraissais être le meilleur moyen de descendre la Loire dans sa partie rapide avant de prendre le Paddle lorsque ce serait navigable. Mais tout ça est avant tout régi par la Nature et les aléas météorologiques. En effet, lors de la remontée en vélo, j’ai pu bien observer la Loire…. Et elle est sèche!!! Elle est vraiment sèche!! Même sous certains ponts de grande villes comme Giens, on y voit les rochers à secs!

Tous les locaux croisés tout au long de la Loire sont unanimes, la Loire manque cruellement d’eau!! Bon, tant pis ! Ça me pose quand même un sérieux problème quand à la réalisation de mon aventure. La partie hydrospeed est impraticable et pour le reste, il y a des portages tous les 300 mètres… Ça sent la fin alors que ça commence à peine. Mais c’est hors de question de renoncer.

Je ne sais pas comment je vais faire mais je ne suis pas du genre à baisser les bras face à des difficultés imprévues. C’est d’ailleurs ça l’aventure à mes yeux. Partir à la rencontre de l’inconnu sans savoir si on va y arriver, ni même si cela est possible ou non. Dans tous les cas il faut foncer pour savoir! Ou vivre avec des regrets…

Du coup je trouve une solution! Je remplace les 5 jours d’hydrospeed par de la marche à pied. Je marcherai au plus prés de la Loire! Bon, par contre je n’ai pas du tout l’équipement adapté mais j’y vais quand même! Mon sac à dos n’est pas du tout un sac de marche, c’est un sac étanche prévu initialement pour le paquetage. Il est à peine réglable et ne tient pas bien sur le dos. Il se déforme partout et je me demande s’il va tenir le coup. De plus, je n’ai pas assez de place et je dois porter un autre sac par dessus! Et pour couronner le tout, mes chaussures de marches n’en sont pas! Ce sont des après ski basiques, qui ne tiennent pas aux pieds ni aux chevilles. Et je n’ai pas de bâtons de marche!!

Niveau matos randonnée, c’est zéro mais niveau mental je suis prêt! En avant! Je pars donc depuis la source. J’ai même escaladé le mont gerbier pendant mon ravitaillement
histoire de faire les choses bien 😉 Les premières journées sont belles car je suis au plus près de la Loire. J’évolue dans la neige et le soleil est de la partie. De plus, j’arrive vite dans les gorges qui sont d’une beauté surprenantes! Je n’ai pas pris de chemin officiel pendant 2 jours. Et pas de regret pour l’hydrospeed, c’est toujours sec!

Les autres journées sont plus longues car des routes suivent la Loire et je marche sur la
départementale qui est vraiment « collé » à la Loire. Tout se passe bien. J’arrête la marche à Lavoûte-sur-Loire. Mon autre ravitaillement approche et ma plus grande inquiétude reste le manque d’eau. En Stand Up, ça ne passera pas! Autant acheter des bottes, marcher au milieu de la Loire et traîner le Paddle!!

STAND UP PADDLE

Mon ravitaillement dure du vendredi soir au dimanche soir. Dimanche, je prends la décision de partir de Lavoûte-sur-Loire en vélo et d’avancer le plus possible histoire de gagner quelques kilomètres sur une Loire sèche, ce qui m’évitera quelques dizaines de portages dans les rochers avec le matériel de SUP.

Je fais dans les 80 kms et je m’arrête à Saint-Cyprien. Mes ravitailleurs me laissent là avec mon Paddle et mon matos. Il pleut mais il y a toujours très peu d’eau…. On verra bien!!
Miracle!! le lendemain, la Loire est montée de 50 cms!! Ça me suffira surement pour passer à la rame certains passage à sec. Je pars donc de Saint-Cyprien en Stand Up Paddle. Effectivement! La Loire est un peu montée. Le challenge prédominant pour ces prochains jours est clairement la négociation avec les rapides! Car oui, il y en a un paquet!

Les passages à secs d’hier sont des passages rapides aujourd’hui. Avec le froid extérieur mieux vaut ne pas tomber, sans parler des rochers qui frôlent mon SUP rigide. Si je tape trop fort, en étant chargé à 40 kilos, ça risque de faire de sacrés dégâts. Et puis pour être honnête, je n’ai aucune expérience en rivière! Je suis un partisan de l’apprentissage en situation, sur le terrain, face au mur. Parce que lorsque l’on se laisse moins de choix, on apprend beaucoup plus et plus vite!

Les premières journées sont assez difficiles. Je suis bien plus fatigué à cause de la concentration que demande la navigation que par la rame en elle même qui dure entre 5 et 7h par jour. Et puis le froid fatigue également. Mais ça passe. Je commence à avoir un regard différent sur tout ce qui m’entoure, sur le moindre mouvement d’eau. Ma lecture du plan d’eau s’affirme et je prends plaisir à choisir la bonne veine de courant, à deviner les bancs de sables, à passer des ponts dangereux sans reconnaissance, etc.

Bien sûr, cela a pris du temps. J’ai même eu droit à une petite frayeur en tombant sous un pont avec un passage rapide. Deux veines de courant se sont rassemblés mais en venant de droite et de gauche, ce qui a créé un bon gros clapot latéral et non dans le sens du courant. J’en suis tombé et le SUP c’est retourné. J’ai agit vite et je l’ai remis à l’endroit pour sauter dessus tout aussi rapidement. Heureusement que là, pour le coup, il y avait du fond et pas d’arbres ni autres débris. Sinon, l’issue aurait été probablement différente!

La Loire change de visage tout du long. Elle commence en ruisseaux montagneux pour devenir rivière dans les gorges. Ensuite, elle s’élargit petit à petit pour ressembler à une grosse rivière, d’abord en pleine nature pour après être bordée de petits villages. Puis, elle s’élargie pour prendre sa dimension de Fleuve Royal et se jeter dans l’océan où là, sa largeur est démesurée.

Le plus dur a été la gestion de l’humidité constante liée au froid. Avec des températures
largement négatives, il est facile pour pas mal de baroudeurs d’imaginer le gel qui s’infiltre un peu partout. Premièrement, on se mouille par la navigation, au moins les pieds et mains. Sinon, c’est par la pluie ou la neige. Parce que oui, j’ai eu droit à à peu prés tous les temps! Neige, pluie, vents forts et même grêle! Ensuite, un épais brouillard se crée sur la Loire dés que le soleil se cache. Du coup, brouillard=humidité, Humidité+froid=gel. Donc tout ce qui est humide gèle!

C’est comme ça qu’un matin parmi d’autres, je me retrouve avec du gel à l’intérieur de la chambre de la tente. Même mon sac de couchage avait gelé. Et ma combi sèche? Gelée! Mes gants? Gelés! Et j’en passe. Pour moi, c’est ça qui fut le plus difficile. Être une sorte de glaçon flottant sur la Loire. Haha!

Mais il y a un autre phénomène qui va plaire au pratiquant de SUP. Ce sont les vents d’ouest! En effet une bonne partie de la Loire est connue pour ses vents dominants d’ouest, qui se trouvent être face à nous lorsqu’on la descend… Le résultat, si l’on veut avancer, donne de nombreuses heures à ramer à genoux avec un capot conséquent puisque le vent de face s’oppose au courant naturel de la Loire. Donc pour peu que le fond soit proche, le clapot grossit fièrement! Ça devient un sérieux Upwind!

Les deux derniers jours, je dois composer avec la marée et la vase… La vase sur tout le matos et sous la tente est d’un bonheur exaltant 🙂 . Heureusement, le soleil en journée chauffe! La nuit, il y a toujours du gel mais en journée, il fait plus de 10 degrés vers Saint Nazaire. C’est la première fois depuis plus de 40 jours que le soleil chauffe! C’est d’un régale!!

ALBUM PHOTOS

BILAN

Dans la finalité, tout s’est bien déroulé.  J’ai faire une moyenne de 40 kms par jour. Avec un seul jour sur tout mon périple où je suis resté sans avancer. Il faut dire que ça soufflait à 70/80 km/h… Au total, j’aurais mis 43 jours pour faire l’aller-retour sur la Loire en hiver et en « quasi » autonomie. Soit plus de 2000 kms.

Je dirais que j’ai réussi grâce à trois facteurs principalement. Le premier étant clairement la
motivation. Le deuxième étant la Chance, car j’en ai eu beaucoup et que c’est avant tout la nature qui m’a laissé passer. Et le troisième, c’est bien sur les personnes qui m’ont aidé, suivi et encouragé car oui, pour la réussite d’une aventure même en solo, la présence des autres dans l’ombre joue énormément.

Les membres de l’association « Stéphane Bouillon » et mes proches qui sont venus m’accueillir à mon arrivée avaient l’air ravi de ce qui à été accompli, ça me remplit de joie!

L’envie de repartir est déjà présente et les idées de projets sont nombreuses! J’ai hâte!
Merci à tous ceux qui m’ont aidé d’une quelconque manière.

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