Présentation de Tiphanya, une Maman nomade

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Aujourd’hui j’ai le plaisir d’accueillir Tiphanya, une Maman nomade et chroniqueuse littéraire. Elle voyage depuis septembre 2013 avec sa fille de 2 ans et son chéri : sud de l’Europe, Croatie, Turquie, Grèce et Sicile. Avant ça, elle a été volontaire au Kirghizstan (enceinte) et au Togo (débouchant sur une reconversion pro). C’est donc une famille Globetrotteuse qui participe ma série de portraits.

Dans sa présentation, on peut dire que Tiphanya s’est « lâchée ». Elle s’est fait plaisir et c’est l’essentiel. Elle nous livre une vraie présentation complète d’elle. Je la remercie pour sa franchise et le fait de se livrer autant à nous. Elle se met presque à nue.

Tiphanya tient également un blog « Avenue Reine Mathilde« . Elle le considère comme un exercice d’écriture régulier. Elle a le doux rêve de publier un jour un récit de voyage.

Tiphanya, je te laisse la parole et rendez-vous juste après sur ton blog.

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Difficile d’échapper à l’imagerie de la princesse frêle et du prince charmant fort et courageux. J’ai grandit en étant persuadé que je ne voyagerai qu’une fois mariée, en compagnie de mon mari, qui sera absolument merveilleux et beau (une sorte de Brad Pitt, version « 7 ans au Tibet »).

Une image qui m’a longtemps poursuivi, car j’ai commencé à voyager à 17 ans, en me contentant de pays faciles et en laissant l’un de mes rêves de côté, l’Afrique. Je me suis baladée en Australie, dans plusieurs pays d’Europe, à New-York, à Montréal, en ayant toujours d’excellentes raisons pour nier l’affirmation familiale « quelle aventurière ».

Depuis j’ai lu Ella Maillart, laissé tomber un pseudo prince charmant qui ressemblait finalement bien peu à Brad Pitt, et pris peur de ne jamais voir le monde. Angoisse terrible : s’il n’y a pas de prince, je n’aurai jamais mon mari parfait et donc je n’irai jamais en Afrique sub-saharienne !

présentation pour français (1)

Certains sombrent dans le chocolat ou la dépression. J’ai passé une journée entière (sur mon lieu de travail) à chercher une solution. J’ai découvert la Guilde du Raid, postulé pour une place de volontaire pendant un mois au Togo, posé mes vacances. Lorsque j’ai reçu la confirmation de mon inscription il me restait 21 jours avant le départ, aucun vaccin à jour. Absolument aucun. Dans le bureau du médecin spécialiste en piqûre pour futur aventurier ou expatrié, j’ai eu peur de lui annoncer la date de mon départ. Étais-je du genre à annuler un voyage car mon vaccin de la fièvre jaune n’était pas à jour ? Mais le hasard fait bien les choses, le médecin était sympa et considérait avoir le temps de me faire encore beaucoup plus de vaccins que nécessaire. D’ailleurs on s’est revu, la semaine suivante, pour une deuxième dose. Une dizaine d’injection plus tard, j’ai mis fin à nos rencontres, les bras légèrement douloureux et l’esprit totalement concentré sur les jours qui défilent et le rêve qui approche.

J’ai découvert le Togo, j’en suis tombée amoureuse, j’ai repris mes études, j’ai appris à parler swahili. J’ai continué à lire aussi, Nicolas Bouvier, mais aussi Sonia et Alexandre Poussin et leur incroyable récit Africa Trek.

Finalement, j’ai découvert un autre prince, humour incompréhensible, le look d’un étudiant en cinéma indépendant. Une autre planète. Mais un mec qui te propose après avoir discuté quelques minutes de se faire un trip à Ecosse. Un peu comme Pékin Express, des points de départs différents, un sac à dos, le budget d’un étudiant et un lieu pour nous retrouver une semaine plus tard. Un mec pas vraiment sérieux quoi. J’ai refusé son projet écossais. Six mois plus tard, j’étais en Malaisie avec lui. Et ses parents. Et ses sœurs. Ses trois sœurs. Pour le mariage d’une amie qui serait comme une quatrième sœur pour eux. Nous étions logés dans la famille de la mariée bien entendu.

Troquer ses habitudes de voyageuse solo qui aime la tranquillité contre l’aventure familiale, brrrrr, ça donne des cauchemars. D’ailleurs en revenant je l’ai dit : plus jamais de voyage en famille.

présentation pour français (2) (Copier)

C’est bien pour ça que quand j’étais enceinte je suis partie toute seule. Au Kirghizstan. Enceinte de 4 mois, prof de français volontaire. Deux nuits sous une yourte, le reste chez l’habitant. Entre 2200 et 3000mètres d’altitude. Les plus belles montagnes que je n’ai jamais vu. Et une quantité de moutons ingurgités… Heureusement qu’il y avait des nouilles (cuites dans le gras du mouton) pour éponger le tout.

Personne (en dehors du futur papa bien entendu) ne savait que j’étais enceinte en partant. Pour l’annoncer, j’ai préféré attendre que mon homme rentre du Japon, vérifié qu’il n’était pas radioactif et une petite fête de famille plus tard : bravo les futurs grands-parents.

On s’attend toujours à ce que nos gestes parlent d’eux-mêmes. Mais certaines personnes sont souvent plus aveugles que l’on croit. Ainsi l’annonce de l’arrivée d’une voyageuse avant l’heure fut salué d’un « c’est marrant, vu comme t’aimes voyager, je ne pensais pas que tu ferais des enfants si tôt »…

Depuis mes rêves de Brad Pitt, j’ai finalement bien grandi et compris un truc : si tu veux une chose, débrouille toi toute seule. Aucun aventurier avec chapeau de cow-boy ne viendrait m’enlever pour me conduire autour du monde. Que cela ne tienne, j’enlèverai mon homme à ses bouquins (d’archéologie, j’ai quand même fait attention en le choisissant), ma fille d’une rentrée à l’école à l’âge de deux ans, et direction la Croatie.

Inutile de demander pourquoi la Croatie, nous ne le savons toujours pas. Toute réponse ne serait que mensonge pour remplir cette description.

Après cinq mois, celui qui se languissait de ses livres aux premiers jours ne veut plus rentrer. Ma fille n’en pense pas moins, je crois que le concept de unschooling lui conviendra tant que nous lui fournirons des nouveaux plats à manger régulièrement, des animaux à observer et des personnes avec qui jouer. Une grand-mère grecque avec qui cuisiner lui plaît tout autant qu’une petite fille italienne qui tient la main de sa maman pour faire du toboggan. Nous avons un champ d’action suffisamment large pour l’occuper pendant pas mal d’année.

En plus, en me confiant le rôle d’aventurière, pardon, en accaparant le poste de chef d’expédition, je peux mener des petites expérimentations. Vivre sur une petite île coupée du monde à chaque coup de vent. Enseigner l’italien à ma fille en l’abandon aux griffes d’une baby-sitter sicilienne. Cuisiner des biscuits sans beurre mais plein d’huile d’olive. Trouver un équilibre entre confort, découverte du monde, vie sans école, soirée télé, journée à vélo…

Oh bien sûr, j’ai aussi appris que l’amour et l’eau fraîche ne suffisent pas. Mes nombreuses lectures m’ont fait croire que voyager m’ouvrirait les portes du métier d’écrivain. Aucune porte à l’horizon pour le moment, mais je ne cesse de voyager et d’écrire, et d’avancer dans l’un et l’autre de ces domaines qui me passionnent.

Alors j’utilise une autre passion, tardive, pour financer l’ensemble : les langues étrangères. En réalité, à l’âge de 13 ans, j’ai tenté d’apprendre le turc, puis aussi lycée j’ai essayé le polonais et le russe pendant la pause déjeuner. Une licence de swahili en poche, c’est maintenant l’italien que j’apprends, simplement parce que je vis depuis deux mois en Sicile. Mais j’ai aussi un diplôme plus sérieux, des études très enrichissantes sur l’enseignement des langues étrangères. Un diplôme, de bonnes idées et skype, il n’en faut pas plus. Enfin si, des élèves. J’enseigne le français à des étrangers (adultes), l’anglais à des enfants (français), je suis consultante pour les personnes perdus dans leur apprentissage des langues étrangères, ainsi que pour les parents vivant dans des situations de plurilinguisme et ayant des difficultés à trouver un équilibre familial ou à atteindre leurs objectifs. Un peu de ci, un peu de ça, beaucoup de rêves.

Les princesses frêles et les princes charmants ne sont que des chimères qui peuplent les livres fantaisistes pour les enfants. Mais Ella Maillart, Paul Theroux, Alexandre et Sonia Poussin, peuplent également les livres de bibliothèque et sont rarement lus aux enfants. Mais ils ont existé, pour de vrai ! Certains jours ils étaient frêles, naïfs et un peu seul. Mais d’autres, ils étaient charmants, forts, polyglottes, curieux, humains. Finalement je rêve toujours d’être une héroïne de roman, mais mes lectures ont légèrement changé.

Maman nomade http://avenuereinemathilde.com
Chroniqueuse littéraire http://histoire-de-lectures.over-blog.com

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